Rallumez la TV: Le coup de génie du désespoir...

Linette, Gabrielle, Bree et Susan...voilà des noms qui ne diront rien aux étrangers de la bourgade américaine de Wisteria Lane. Ces quatre femmes sont au coeur d'une aventure télévisuelle qui frise le niveau de qualité que tout spectateur qui se respecte devrait réclamer. Quatre femmes au foyer au milieu de la jungle d'un quartier résidentiel haut standing subissant les assauts du sors (avec l'aide de la bonne et mauvaise conscience du voisinage), voilà les ingrédients de la série Desperate Housewives.

J'ai immédiatement accroché à cette ambiance américaine moderne, presque épurée, stéréotypée à l'extrême...et là, c'était mon premier choc! Pourquoi cette série sur un thème aussi incongru commençait-elle à me passioner? Après quelques épisodes, j'avait compris qu'au-delà du thème, il y avait le véritable génie créatif: chaque épisode est le chapitre d'un roman moderne, alliant la narration aux images typiques et connues de chacun d'entre nous, titillant la corde sensible tout juste au bon endroit...Au fond, me direz-vous, Desperate Housewives, c'est quoi?

C'est un enchevêtrement de mystère qui, au fur et à mesure de leur révélation, ne font qu'en engrenger d'autres. Jouant sur l'inattendu en permanence, le producteur confronte les images classiques et terriblement banales d'une vie américaine contemporaine avec la surprise des actes déplacés voire malsains. Imprégnant plus encore la véritable nature humaine, imparfaite et criblée de vice, on se sent pris par la main pour vivre des aventures qui ne nous appartiennent pas, en voyeurs distants et anonymes.

Pourquoi parler de génie? Parce que la réflexion créative qui sous-tend cette série est énorme. On peut parler des transitions entre les scènes qui sont toujours spécifiquement orchestrées: utilisant des objets, des couleurs, des mouvements même, on passe d'un évènement à l'autre en douceur et cohérence. Ensuite, il y a "Marie-Alice", la voisine au coeur du mystère de Wisteria Lane, celle qui, un beau matin de printemps, s'est suicidée sans que personne ne puisse se douter d'un tel évènement...moins encore des raisons qui pouvait l'y pousser. Elle est la narratrice, depuis ses nuages divins. Assitant à cette vie qui continue de suivre ses courbes chaotiques, elle tire les leçons, retrace les évènements...et curieusement, met en évidence les liens parfois brumeux de toutes ses vies qui courent et roulent, déambulent et se mortifient sur les chemins d'une certaine rédemption.

Le "thème" est une notion également appréciable. Chaque épisode est une bulle impeccablement soufflée qui s'articule autour d'un thème. Les premiers mots de chaque épisode, prononcés par la narratrice, mettent en place la scène: voilà ce qu'il s'est passé...devinez ce qui va se dérouler sous vos yeux, maintenant! Et après 40 minutes, force est d'admettre que, par exemple, la confiance était au coeur de l'épisode. La voix se ranime telle un prophète: "Certaines confiances ont été trahies, d'autres précautionneusement respectées. Alors que certaines ne seront jamais récupérées, d'autres ne sont que dans une passe sombre et noir, attendant le retour de jour plus lumineux. Mais le plus important, concernant la confiance, c'est de savoir à qui la concéder...". Tout en images "récapitulatives", le générique apparaît avec la dernière gorgée sucrée...

Hé oui, j'accroche et ne décroche plus...impatient de finir la première saison et de bientôt découvrir la deuxième, je ne peux espérer que ce franc succès saura mener sa barque encore pour quelques saisons et me laisser porter comme un enfant en quête de moral par la voix satinée d'une défunte instigatrice: le désespoir des femmes au foyer ne m'aura jamais autant interpelé!

En direct de "Fan Séries", c'était Peter!
A vous les studios!